Différence entre gestion d’un risque et incertitude.

Nous analysons dans nos métiers de consultants, de préventeur des risques professionnels, de chef d’entreprise,… les risques face à des dangers identifiés. Nous analysons les mesures de prévention mises en œuvre pour maîtriser les risques lorsque le danger ne peut être supprimé…
Cette méthodologie nous est devenue familière.
Nous sommes également coutumiers d’une analyse des risques et opportunités lorsque nous mettons en place un système de management…
Le risque = Danger X fréquence d’exposition à ce danger (ou l’occurrence)
Le Danger = 1 VIRUS INCONNU…

Le risque c’est d’être contaminé….avec pour conséquences ??

de simples maux de tête ?…des symptômes grippaux ?…. d’avoir une insuffisance respiratoire ?…d’être hospitalisé ?…..d’être placé dans un coma artificiel en service de réanimation en espérant que le corps résiste sans la force de notre mental ?…..de ne pas survivre ??
Le danger donc va être plus ou moins bien estimé, apprécié selon les individus…
Sans rentrer dans toutes les polémiques, ce dont nous sommes tous convaincus c’est que ce virus n’est pas inoffensif pour l’homme. La polémique repose sur son niveau de dangerosité et sur notre capacité individuelle à y résister.
Nous ne sommes donc plus dans le risque mais dans l’incertitude !
Et si l’on rajoute que nous ne sommes pas en mesure à notre niveau d’estimer la capacité d’accueil en réanimation de nos services hospitaliers…l’incertitude face à ce nouveau virus augmente….
Nous sommes tous confrontés à l’incertitude dans notre parcours de vie…lorsque nous en prenons conscience cela peut nous effrayer. De manière naturelle, nous avons besoin de sortir de l’incertitude pour nous rassurer.

Risque et incertitude

« La distinction entre risque et incertitude a été introduite il y a près d’un siècle par l’économiste américain Frank Knight. Il définissait le risque comme un futur dont la distribution d’états possibles est connue. Par exemple, si l’on met trois boules vertes et deux boules rouges dans une urne, on connaît le « risque » de tirer une boule verte (60%).
En effet, le risque correspond à des événements connus, répétés à l’identique, sur lesquels on est donc capable de constituer des statistiques, lesquelles deviennent des probabilités que l’on peut utiliser pour anticiper l’avenir. Ainsi, l’historique des vols de voitures permet aux assureurs de tarifer l’assurance contre le vol automobile : si 0,3% des Renault Clio sont volées chaque année, la vôtre a 0,3% de chances de l’être.
L’incertitude, telle que définie par Frank Knight, correspond en revanche à un futur dont la distribution d’états est non seulement inconnue, mais impossible à connaître : pour reprendre l’image de l’urne, on ne connaît pas le nombre de boules à l’intérieur de celle-ci, et encore moins leurs couleurs ; peut-être n’y-a-t-il même pas de boules, ni d’urne. Cette incertitude est objective : elle ne tient pas à la difficulté d’accéder à l’information ou à l’incompétence de l’observateur, mais à la nature inédite du phénomène auquel on est confronté. Un nouveau marché, une guerre, une technologie innovante ou une élection sont typiquement caractérisés par des hauts niveaux d’incertitude, car, même s’il existe des aspects connus, chacun de ces événements est unique. Ainsi, dire « il y a 14% de chances que la voiture électrique connaisse un succès commercial » n’a aucun sens car on ne peut pas répéter une dizaine de fois cette invention pour en tirer des conclusions statistiques. »
https://www.hbrfrance.fr/chroniques-experts/2020/03/29526-ce-que-le-coronavirus-nous-apprend-sur-la-gestion-de-lincertitude/

La distinction entre risque et incertitude permet de mieux comprendre la difficulté de gestion de la pandémie à laquelle nous sommes confrontés.
La crise mondiale liée au Coronavirus est inédite tant d’un point de vue sanitaire que d’un point de vue économique. Nous avons tous espéré que ce COVID-19 puisse être traité comme une grippe saisonnière.
La grippe est une maladie qui revient chaque année. Elle est bien connue, son impact aussi (absentéisme dans les entreprises et les écoles…, contagiosité, morbidité forte…). Elle fait partie du domaine du risque puisque le danger que représente ce virus est identifié et se répète. Cet évènement peut même faire partie des statistiques.
Le (ou la) COVID-19, est inédit. Nous ignorons encore beaucoup de choses à son sujet, les plus grands spécialistes se contredisent ce qui alimente la polémique populaire. Les mesures de prévention mises en œuvre par les gouvernements divisent les populations : trop ou pas assez de prévention ?
Avec ce virus, nous sommes dans l’incertitude, notamment sur sa létalité et les lésions potentielles qu’il semble laisser. Cette incertitude sur le niveau de danger, sur la létalité est anxiogène. La peur, cette émotion qui accompagne la prise de conscience d’un danger, est une attitude rationnelle.
Décider dans l’incertitude
Face à une situation inédite, l’incertitude peut varier considérablement.
Le plus souvent, on peut se référer à des situations analogues, ce qui permet de mettre en lumière des similitudes et des différences.
« C’est le cas avec le COVID-19 : on connaît beaucoup de choses sur les virus et mêmes certains coronavirus, sur leurs modes de diffusion en général, sur les mesures prophylactiques efficaces (comme se laver les mains) et sur la façon de les soigner, mais on ne connaît pas le taux de morbidité ni de létalité du Covid-19. Et, surtout, va-t-il muter en une forme beaucoup plus mortelle, comme ce fut le cas pour la grippe espagnole ?
La question, dès lors, est celle de savoir ce que l’on fait face au danger, d’autant que l’on ne dispose pas de toutes les informations nécessaires et que la situation évolue constamment.
Si des décisions drastiques sont prises alors que les signes du danger ne sont pas encore suffisamment visibles, le décideur peut être accusé d’alarmisme.
Mais si elles sont prises lorsque les signes sont déjà criants, il peut être trop tard.
Dans un contexte de prise de décision avec un manque d’information significatif, le décideur pèse donc un double risque : d’un côté, celui d’agir de façon drastique, ce qui a un coût très important, à la fois direct et indirect, face à un danger qui peut finalement se révéler mineur et, d’un autre côté, le risque de ne pas agir, ou d’agir trop lentement, et de précipiter ainsi la catastrophe. Les travaux sur l’incertitude montrent que, dans ce genre de situation, il est souvent plus facile d’évaluer la perte acceptable que le gain attendu.
A cette difficulté s’ajoute un paradoxe : l’efficacité même d’une réponse, en permettant de limiter l’épidémie, peut faire douter que la menace ait été réelle en premier lieu.
En définitive, cette crise du COVID-19 met en exergue trois points clés pour le décideur confronté à l’incertitude :
Le premier, c’est d’avoir conscience des degrés d’incertitude de la situation et pour cela de bien distinguer entre ce que l’on sait, ce que l’on suppose, ce que l’on ne sait pas et ce qui ne peut être connu ;
Le deuxième, c’est d’être capable d’identifier des situations analogues dont on peut s’inspirer, à condition de bien distinguer ce qui est similaire et ce qui est différent ;
Le troisième, c’est de peser autant que possible les risques entre agir de façon drastique et agir trop tard, la notion de perte acceptable suggérant une préférence pour le premier. »
https://www.hbrfrance.fr/chroniques-experts/2020/03/29526-ce-que-le-coronavirus-nous-apprend-sur-la-gestion-de-lincertitude/